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Turquie : le rappeur Ezhel arrêté pour avoir défié la censure autour du cannabis

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En Turquie, les lois anti-cannabis sont dures et la culture cannabique est taboue. La censure gouvernementale et sociale est de mise et les consommateurs préfèrent rester discrets par peur des conséquences. Ce n’est pas le cas d’Ezhel, un rappeur turc de 28 ans, qui ne s’en cache pas et parle ouvertement de sa consommation de cannabis dans ses textes. Il a échappé à la censure en publiant son album Müptezhel (qui veut dire stoner en argot) via Spotify en 2017. Depuis, il a été condamné plusieurs fois pour incitation à la consommation de stupéfiants et est actuellement traduit en justice.

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La répression du cannabis en Turquie

Il n’est pourtant pas rare de consommer du cannabis en Turquie, surtout chez les jeunes citadins de la classe moyenne. De plus, l’islam n’émet aucune restriction sur cette substance, à l’inverse de l’alcool. Pourtant, le parti islamique qui gouverne actuellement le pays n’a aucune intention de relaxer les lois anti-drogues. En 2014, il a même fait passer la sentence de prison maximum pour possession de drogue à cinq ans au lieu de deux. La production de cannabis à des fins de recherche est légale depuis 2016 mais strictement régulée et soumise à l’accord préalable du ministère du Bétail et de l’Agriculture.

Parallèlement, en 2017, la répression s’est accrue : le ministre de l’Intérieur a déclaré que les saisies de cannabis par la police avaient augmentées de 217% comparées à l’année 2016. Il a ajouté que les « forces de l’ordre devraient traiter les dealers de drogues comme des terroristes » voire « qu’il était de leur devoir de leur briser les jambes lorsqu’elles voient des dealers près des écoles ».

En mai 2018, le chef de la brigade des stups turcs, İbrahim Seydioğulları, a annoncé un nouveau renforcement de la répression. Il a notamment déclaré que le simple fait de partager sur les réseaux sociaux une photo ou de porter un vêtement, ne serait-ce qu’un pins, avec un symbole de cannabis était un crime passible de 2 à 5 ans d’emprisonnement conformément aux provisions du code pénal.

L’affaire Ezhel

Les textes du rappeur parlent de la vie sous un régime autoritaire, de la polarisation sociale, des effets de la politique sur la vie des citoyens ainsi que de thèmes moins politiques comme l’amour et le sexe mais toujours du point de vue du stoner. L’aspect politique est assez subtil mais la revendication de sa consommation de cannabis n’est absolument pas voilée. Interviewé par Cannabis Wire, il déclare: « le rap c’est à propos de décrire sa vie et ses expériences, à propos de l’expression de soi. Le cannabis fait partie de ma vie, c’est la seule raison pour laquelle j’en parle dans mes chansons, entre autres choses ».

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En mai dernier, quelques jours après la déclaration d’İbrahim Seydioğulları et à la suite d’une plainte anonyme déposée au centre de communication du premier ministre, il est arrêté pour incitation et promotion du cannabis. Il encourt une peine potentielle de cinq à dix ans de prison pour ses chansons et des posts Instagram où il apparait avec une feuille de cannabis. Il est incarcéré en attendant son procès mais son arrestation et sa détention provoquent une vive réaction sur les réseaux sociaux, notamment sur Twitter où le hashtag #FreeEzhel est devenu un des plus populaires durant plusieurs jours. Amnesty International a même lancé une campagne pour sa libération.

L’affaire a conduit le gouvernement à discuter de la compatibilité de ses lois antidrogues avec la liberté d’expression. Ezhel a été acquitté puis libéré après un mois de prison, le juge ayant estimé que les charges contre lui devaient être replacées dans le contexte de sa création artistique. Mais trois semaines après sa libération, Ezhel reçoit un nouvel avertissement de la part des autorités et, en juillet, il est condamné de nouveau pour incitation et promotion à l’usage de stupéfiants.

Il a décidé de plaider non coupable lors de sa première audience le 6 novembre en déclarant: « Je n’ai absolument pas l’intention de faire la promotion de quelque chose de préjudiciable pour la société. Mes productions sont des œuvres d’art. Je nie l’accusation ». La prochaine audience se tiendra en février 2019.

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