Cannabis en France

Terra Nova suggère une « légalisation raisonnée » du cannabis pour « assécher les trafics »

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Dans une étude publiée vendredi 9 octobre, le think tank Terra Nova s’intéresse à la stratégie policière et pénale entourant le cannabis en France. Si l’échec est constaté et acté par la population, les solutions pour dépasser le statu quo divergent. Face aux difficultés policières, notamment la dégradation des relations entre policiers et population et l’inefficacité demi-séculaire d’une politique répressive, Terra Nova préconise une « légalisation raisonnée » du cannabis.

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« En l’espèce, la police et l’institution judiciaire ne résolvent ni le problème sécuritaire ni le problème sanitaire lié à la vente de stupéfiants. Elles ne répondent pas à la demande sociale en la matière, s’épuisent avec des affaires qui ont peu de sens, mènent des actions ayant peu d’effets durables au prix de ressources importantes » explique Mathieu Zagrodzki, auteur du rapport.

Pour se donner les moyens de démanteler des réseaux de plus en plus sophistiqués, Mathieu Zagrodzki suggère « un changement de direction » : « La légalisation n’est pas la solution miracle, mais simplement une approche plus pragmatique permettant d’affronter le problème sur le long terme ».

Pour Terra Nova, la légalisation permettrait de lutter contre la consommation de cannabis tout en assurant une présence des pouvoirs publics dans le contrôle et la gestion du cannabis en France. Le think tank préconise ainsi la création d’une autorité de régulation dont le rôle ne serait plus celui de la répression systématique mais davantage celui de faire baisser la consommation et de contrôler les risques liés aux usages.

La parole donnée aux forces de l’ordre

Le rapport donne aussi la parole aux forces de l’ordre, qui, si elles ne penchent pas majoritairement pour une légalisation, constatent en partie l’échec de leur mission quotidienne sur les stupéfiants parfois motivée par la politique du chiffre.

« Je suis très contre les stups, je n’ai aucune tolérance, même si je fais la différence entre un chichon et de grosses quantités. J’étais pour le fait de suivre systématiquement. Mais ça prend vachement de temps et ça conduisait à un PV simplifié, où on fait l’interpellation et audition à la fois en-dessous d’une quantité de stups. (…) Pour moins de 10 grammes, ça n’est pas la peine d’aller plus loin car il y a trop de procédure. Le gars va sortir avant que j’aie fini de taper la procédure » fait part une gardienne de la paix.

Pour un membre de la BAC d’un arrondissement parisien, « le petit consommateur, on est parfois obligés de le ramener, mais c’est pour le chiffre, le patron nous le demande. C’est pas gratifiant, ça ne m’intéresse pas, tout le monde en a aujourd’hui. Le chef de brigade nous dit « c’est le commandant qui nous demande ça », le commandant dit « c’est le grand boss qui demande ça ». (…) C’est pas mon boulot de baqueux, on recherche du plus gros. La brigade VTT fait beaucoup de consommateurs, mais là aussi c’est pour être tranquilles pour leurs stats. »

« Il faudrait changer l’approche, qui est dogmatique, caricaturale, politique. On dit « c’est illégal, donc il faut sanctionner », on ne réfléchit pas. Chez les consommateurs et les revendeurs, il y a peu de gens foncièrement mauvais ou dangereux. Ce sont des gens qui sont tombés dans les trafics par opportunité, cela reflète la misère sociale. Peu de riches trafiquent » confie dans le rapport un gardien de la paix rattaché à la brigade des stupéfiants d’une grande métropole française.

4è rapport de Terra Nova

Ce rapport « Cannabis : pour une autre stratégie policière et pénale » vient à la suite de trois autres rapports sur le sujet.

Le premier, fréquemment cité pour son chiffre sur le coût annuel de la répression du cannabis en France, examinait la possibilité de réguler un marché légal plutôt que de réprimer un usage très diffus et de laisser prospérer une économie souterraine. Il soulignait notamment que la légalisation encadrée de la production, de la vente et de l’usage du cannabis permettrait de contrôler les prix, le niveau des usages, la qualité des produits en circulation et dégagerait des ressources pour une véritable politique de prévention.

Le deuxième préconisait de réguler le cannabis à la manière des jeux en ligne, avec une autorité centrale.

Enfin, une troisième étude soulignait l’évolution de l’opinion sur ces enjeux, notamment un pourcentage fort (82%) de la population française en faveur d’une légalisation du cannabis thérapeutique et 51% en faveur d’une légalisation du cannabis.

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