Cannabis en France
Terra Nova préconise de légaliser le cannabis sur le modèle des jeux en ligne
Terra Nova, think-tank proche du Parti Socialiste qui avait déjà préconisé une légalisation du cannabis en France dès 2014, publie ce mardi un rapport qui propose la création d’une Autorité de Régulation du Cannabis (Arca) à la manière de celle régulant les jeux en ligne (l’Arjel).
La situation n’a pas évolué depuis 2014. La France est toujours le premier pays européen à consommer du cannabis malgré sa politique très répressive pour les consommateurs, la plus répressive d’Europe d’ailleurs. 700 000 personnes de 15 à 75 ans fument quotidiennement du cannabis, une augmentation de 17% par rapport à 2010. 1,4 million fument au moins 10 joints par mois, et 4,6 millions de Français ont consommé du cannabis dans l’année selon les derniers chiffres de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé.
Terra Nova propose donc de s’appuyer sur ce qui s’est passé dans le domaine des jeux en ligne, en créant une autorité de régulation qui contrôlerait la production et la consommation de cannabis, tout en fixant des règles générales.
La situation de départ était similaire. Avant que l’Arjel ne soit créée, les joueurs en ligne s’adonnaient à leur passion sur des sites illégaux, ce qui n’était pas sans danger en termes d’addiction. La France a légalisé les jeux en ligne et de hasard en 2010 sous la pression de la Commission européenne, en créant l’Arjel, dont une des missions est « la mise en place de moyens de prévention et de réduction des risques du jeu pathologique ». Depuis qu’elle existe, le bilan est plutôt positif. Le nombre de joueurs excessifs est resté stable, même si on a assisté à une légère hausse du nombre total de joueurs. La majorité des consommateurs ont basculé sur l’offre légale, et les pratiques à risque de l’offre légale génèrent moins de problèmes que sur l’offre illégale.
Le parallèle est évident. La principale différence entre les jeux en ligne et le cannabis est que « l’un crée une addiction sans produit alors que l’autre est un produit en tant que tel. La consommation de l’un, sans outil de réduction des risques, est clairement cancérigène, l’autre pas ». La légalisation du cannabis devra donc se faire, pour Terra Nova, en appliquant des dispositions de lutte antitabac (interdiction aux mineurs, avertissements sanitaires, packaging neutre, etc…).
Terra Nova préconise la légalisation du cannabis en France sous le contrôle de l’Arca, qui régulerait le commerce du cannabis en France. Selon le rapport, la production pourrait se faire via des agriculteurs français sous licence ou en important du cannabis de l’étranger. L’autoculture pourrait également être autorisée. La vente de cannabis se ferait au sein de commerces enregistrés auprès de l’Arca : bureaux de tabac, pharmacie ou cannabistrots créés pour l’occasion.
L’Arca n’aurait pas vocation en revanche à collecter les recettes fiscales issues de l’industrie du cannabis, qui seraient plutôt orientées vers la Sécurité Sociale. Dans son rapport de 2014, Terra Nova estimait que la légalisation pourrait rapporter 2 milliards d’euros par an à l’Etat.
Terra Nova propose ici un système intéressant et réalisable, avec une expérience française en la matière dans le domaine des jeux en ligne. Le modèle n’est certes pas livré clés en mains et des points sont à peaufiner (place du cannabis médical, limitation du taux de THC, etc…) mais permet au moins de jeter un pavé dans la mare du statu-quo français avec des propositions réalistes et objectives, basées avant tout sur la situation actuelle du cannabis en France.