Cannabis en France

La saucisse au CBD marseillaise est-elle légale ?

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L’imagination n’a pas de limites. Et si les malades français n’ont toujours pas accès au cannabis médical, les amateurs de barbecue marseillais peuvent désormais acheter de la « saucisse au CBD ».

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Le storytelling est parfait : réunis autour d’un barbecue et d’un pétard, des amis ont l’idée saugrenue d’incorporer à leur mets carné du cannabis. La légalité de la chose ne s’établissant pas d’elle-même, le projet se voit contraint de se limiter à sa version édulcorée, le CBD. Une fois fait le tour des magasins de cannabidiol de Marseille et après de nombreuses expérimentations de recette, la saucisse est baptisée Ouidi et facturée 4,50€ au client.

S’ensuit forcément la farandole médiatique classique qui hésite entre mauvais jeux de mots et ôde à l’inventivité : « un coup fumant », « jeune boucher à la main verte », « héros des temps modernes », « l’alchimiste »… Nicolas Flamel, qui a résidé rue de Montmorency à Paris, appréciera la comparaison entre un ingénieux cuisinier marseillais qui a mis de l’herbe dans du porc broyé et l’inventeur de la pierre philosophale (qui en réalité ne fit jamais d’alchimie). Mais trêves de jalouseries, la question la plus importante à nos yeux est : cette saucisse est-elle légale ?

Luca Morand, inventeur de la-dite saucisse, confie à la Provence qu’il n’a pas changé la recette par rapport à une saucisse à l’oignon, et pose fièrement avec des fleurs qu’on espère être du chanvre à -0,2% de THC, et pas du cannabis, sinon la question de la légalité ne se poserait pas. La saucisse serait donc faite avec des fleurs entières, probablement grindées façon herbes de provence, et pas de l’isolat de CBD.

Plusieurs législations entre donc ici en jeu. D’une part, la saucisse au CBD peut-elle être considérée comme une novel food ? Pas s’il est fait usage de la fleur entière de chanvre, sans extraction « moderne » du CBD. Et pas si le taux de CBD du produit fini ne dépasse pas celui de la fleur, ce qui serait difficilement le cas ici.

D’autre part, la loi française sur le cannabis autorise-t-elle l’usage commercial et industriel des fleurs de chanvre ? Luca Morand croit en tout cas être dans son bon droit : « J’ai regardé toutes les interdictions le concernant : il doit contenir moins de 0,2 % de THC. Et s’il est interdit de le fumer, on peut l’ingérer. Il est d’ailleurs vendu pour des tisanes, des plaquettes de chocolat ou, encore, pour vapoter. »

La loi française n’interdit effectivement pas la culture de chanvre à -0,2% de THC, en restreignant les variétés autorisées et en spécifiant les graines et les fibres pour exemple de l’utilisation industrielle et commerciale du chanvre, et autorise le CBD. Par ailleurs la loi européenne ne restreint pas l’usage du chanvre à une de ses parties. Néanmoins, les autorités françaises ont mené force perquisitions auprès des vendeurs de fleurs de chanvre, sous prétexte de trafic de stupéfiants ou d’exercice illégal de la médecine. Notre boucher pourrait-il également tomber pour trafic de stups ? Si l’on en suit la logique précédente, oui. Si l’on en suit le Droit, non.

Cette saucisse aurait donc droit de cité (phocéenne). Il nous reste à savoir si elle est efficace. La température d’ébullition du CBD, celle qui permet sa vaporisation, se situe entre 160 et 180°C. La température d’un barbecue dépasse largement les 220°C (sur une grille à 10cm des flammes) laissant peu de place à une quelconque trace de CBD en fin de cuisson. Et ça, c’est ce qu’on appelle un coup fumant !

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