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ONU: la France prend la défense du cannabis thérapeutique

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La France soutient le cannabis médical à l'ONU

Pour la première fois depuis près d’un siècle, cette semaine, la France a défendu avec vigueur à l’ONU le potentiel thérapeutique du cannabis, qualifiant de “nécessaire” la recommandation historique de l’OMS de déclassifier le cannabis médical du tableau IV des traités internationaux.

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La liste IV de la Convention de 1961 (le traité international qui régule le cannabis) est la plus restrictive, et, symboliquement, la liste des drogues qualifiées de “fléau”[1]. C’est dans le tableau IV que sont listés l’héroïne, le krokodil ou le fentanyl… mais aussi le cannabis et le haschisch !

En janvier 2019, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), après plus de 2 ans d’analyse scientifique de toutes les données disponibles, recommandait de sortir le cannabis de ce tableau IV. D’autres recommandations plus techniques, visant à faciliter l’accès médicinal. Pourtant, ces recommandations historiques doivent encore être validées ou rejetées par un vote des gouvernements le 2 décembre prochain.

Cette recommandation “soulève clairement la plus forte symbolique et suscite les attentes les plus élevées parmi une partie de notre opinion publique.” C’est ce qu’a déclaré Elena Salazar (de l’ANSM), représentante de la France lors de la réunion diplomatique spéciale à portes-closes, dont Newsweed a pu obtenir le discours.

“Reconnaissant le potentiel thérapeutique du cannabis, il est également essentiel de permettre la recherche scientifique […] la communauté internationale doit envoyer un signal clair à ce sujet. Nous devons être en mesure de montrer […] que nous ne transigeons pas sur le trafic et les dommages sociaux liés aux drogues, tout en tenant compte des évolutions scientifiques concernant le cannabis.”

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– Extrait de la déclaration d’Elena Salazar au nom de la France, lors de la Commission des stupéfiants de l’ONU, mardi 6 octobre 2020.

La représentante de la France s’attacha ensuite à présenter au monde l’expérimentation de l’ANSM en ces termes :

“En 2018, un comité scientifique dédié à la question de la pertinence et de la faisabilité de l’offre de cannabis thérapeutique en France […] a émis un avis positif […] pour un nombre clairement limité de cas : la douleur réfractaire aux traitements disponibles, les soins palliatifs, douleur et spasticité associées à la SEP, pour certaines formes d’épilepsie pharmacorésistantes, ainsi que dans le cadre de l’accompagnement des soins en oncologie. Afin de tester en conditions réelles cet usage médical nouveau et clairement circonscrit du cannabis, une expérimentation devrait être mise en place en 2021, afin d’évaluer le circuit de prescription et de distribution en situation réelle, ainsi que l’engagement des professionnels de santé et des patients dans ces conditions. 3000 patients souffrant des maladies mentionnées ci-dessus devraient être inclus dans cette phase expérimentale. Cette expérience à petite échelle nous permettra de collecter les premières données françaises sur l’efficacité et la sécurité du cannabis médical.”

Avec un tel discours, la France s’est positionnée aux côtés de l’Afrique du Sud, Pays-bas, Jamaïque, Mexique ou Colombie mais aussi États-Unis et Suisse, dans la défense de la déclassification du tableau IV et du rôle de la recherche scientifique dans l’évolution des politiques publiques. Un véritable virage diplomatique confirmé deux jours plus tard, lors de la clôture des consultations cannabis de l’ONU entamées en janvier 2019 [2]. Adrien Frier, sous-directeur en charge de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée au Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, déclara :

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“Alors que nous voterons sur ces recommandations en décembre prochain, il faudra nous souvenir de l’objectif principal des Conventions internationales : protéger la santé et le bien-être de toutes les populations. Il est clair que ces recommandations ne visent pas, et ne doivent pas être considérées comme un pas vers une libéralisation de l’usage non-médical du cannabis, qui est et restera contraire aux Conventions. Il est également clair que nous ne minimisons pas, et ne devons pas minimiser, les risques et dangers pour la santé, en particulier pour les jeunes, et qu’il n’y a pas de place à laisser au trafic et à la violence liés aux drogues. Dans le même temps, les Conventions sont aussi construites sur le principe de leur reflet des évolutions scientifiques, ainsi que sur le fait que l’usage médicinal des stupéfiants continue d’être indispensable pour soulager la douleur et la souffrance. Cela signifie maintenant considérer le potentiel thérapeutique du cannabis

– Extrait de la déclaration d’Adrien Frier au nom de la France, lors de la Commission des stupéfiants de l’ONU, jeudi 8 octobre 2020.

C’est la première fois depuis la fin des années 1950 que la France adopte, sur la scène internationale, une position sur le cannabis différente de l’opposition frontale ou du déni. À l’époque, les efforts de la France et d’autres pays avaient permis que les Conventions excluent tout cannabis cultivé et utilisé “à des fins industrielles” [3] rendant le “chanvre” d’aujourd’hui possible.

Alors que l’Histoire des politiques du cannabis est en train de s’écrire, la France semble consolider ce soutien à la recherche et à l’accès aux cannabis et aux cannabinoïdes à des fins médicales, et défend le droit à la santé et les politiques des drogues basées sur la science, à l’ONU, dans l’hexagone, et dans les DOM/TOM.

[1] La terminologie “fléau” est employée dans la Convention de 1961, disponible à : https://www.unodc.org/pdf/convention_1961_fr.pdf

[2] Seconde réunion intersessionnelle de la 63ème Commission des stupéfiants de l’ONU.

[3] Voir : James H. Mills (2016). “The IHO as Actor: the case of cannabis in the Single Convention on Narcotic Drugs 1961”, Hygiea InternationalisVolume 13 Numéro 1, pages 95-115. DOI: 10.3384/hygiea.1403-8668.1613195. disponible à :https://ep.liu.se/ej/hygiea/v13/i1/a07/hygiea16v13i1a07.pdf

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Kenzi est un chercheur interdisciplinaire franco-algérien basé à Barcelona. Spécialiste du droit international du cannabis, il promeut la réforme des politiques publiques en matière de drogues. Il est co-fondateur de NORML France, du think-tank FAAAT, et de CATNPUD (réseau des personnes usagères de drogues de Catalogne). Prônant la recherche-action (collaboration du monde universitaire et des citoyen.ne.s) comme catalyseur des changements politiques et sociaux, Kenzi s’intéresse au dialogue entre droit international et initiatives locales, articulant son travail autour des questions d’éthique, de droits de l'Homme, de commerce équitable et de développement durable, pour tout ce qui concerne les plantes, mycètes, substances et produits psychoactifs et/ou déclarés illicites.

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