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Etude : la psilocybine pourrait aider à traiter les troubles de consommation d’alcool

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La psilocybine, le principe actif des champignons hallucinogènes, a déjà suscité un vif intérêt pour son potentiel thérapeutique dans divers contextes, notamment pour aider les gens à arrêter de fumer ou à gérer les troubles mentaux. Aujourd’hui, des chercheurs de l’université de Heidelberg espèrent que ce psychédélique pourrait aider à lutter contre les envies d’alcool et les troubles liés à la consommation d’alcool.

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La recherche, publiée dans la revue Science Advances, s’est concentrée sur la capacité de la psilocybine à restaurer l’expression d’un récepteur de glutamate spécifique connu sous le nom de mGLuR2. La réduction de l’expression de ce récepteur spécifique provoque un besoin impérieux d’alcool et des déficiences dans les « fonctions exécutives », selon l’étude, avec des conséquences sur la maîtrise de soi et la prise de décision.

« Dans les troubles liés à la consommation d’alcool, on observe une forte perte de cellules et une dégénérescence du tissu cérébral. Ensuite, au niveau des réseaux, lorsque vous examinez l’activité des différents réseaux, vous constatez que de nombreux réseaux liés aux fonctions exécutives sont principalement régulés à la baisse, mais fortement augmentés lorsque, par exemple, ils sont sollicités par des signaux spécifiques tels que l’odeur de l’alcool », a déclaré le Dr Marcus Meinhardt, auteur de l’étude.

Pour observer les avantages potentiels de la psilocybine dans l’équation, l’équipe a exposé des rats à des vapeurs d’alcool qui les ont intoxiqués à des niveaux similaires à ceux observés chez les personnes présentant une dépendance clinique à l’alcool. En sept semaines, des changements comportementaux et moléculaires durables se sont produits dans le cerveau et les rats sont devenus dépendants de l’alcool, selon les chercheurs.

La première approche consistait à neutraliser complètement tous les récepteurs mGLuR2 dans le cerveau d’un rat dès la naissance, ce qu’ils ont réussi à faire en utilisant une lignée de rats mutants qui présentent ce déficit dès la naissance. L’autre approche utilise une méthode d’édition de gènes ciblée qui vise à supprimer les neurones mGLuR2 des voies de dépendance des rats adultes.

Chaque approche a donné des résultats différents. L’approche ciblée a réduit la flexibilité cognitive d’une manière similaire à l’exposition prolongée à l’alcool. L’élimination complète n’a pas affecté les performances comportementales du rat. Meinhardt explique que l’équipe soupçonne que cette découverte est due à la plasticité du cerveau des mammifères :

« Ce knock-out global est déjà présent au début du développement, et comme le cerveau est très plastique, il peut s’adapter à de très nombreux processus au cours du développement. L’idée est donc que des récepteurs tels que le mGLuR3, qui est très similaire au mGLuR2, pourraient prendre la relève du mGLuR2 lorsque le cerveau se dit : ‘OK, il n’y a plus de mGluR2, alors nous devons compenser cela' ».

Après avoir établi ce constat, les chercheurs ont ensuite administré aux rats l’une des deux doses différentes de psilocybine afin de déterminer si elle serait efficace pour réduire les rechutes. L’équipe a montré que ces modifications incitaient les rats qui n’avaient pas été exposés à l’alcool auparavant à le rechercher en appuyant sur un levier dans leur cage qui le libérait.

Des injections de 1 mg/kg ou 2,5/kg stimuleraient une réponse hallucinogène si elles étaient appliquées à l’échelle humaine et ont permis d’augmenter l’expression du gène lié au mGLuR2, ce qui a finalement réduit le comportement de recherche d’alcool.

Les deux doses ont été efficaces, par rapport à un traitement témoin, selon l’équipe.

« Nos résultats précliniques confirment que le mGLuR2 est une cible moléculaire pour le traitement de la réduction de la flexibilité cognitive, de l’envie de boire et des rechutes chez les patients dépendants de l’alcool », indique l’étude.

Se tournant vers l’avenir et le potentiel des traitements cliniques des troubles de la consommation d’alcool, les chercheurs proposent un certain nombre d’étapes clés. Tout d’abord, ils suggèrent de réaliser un essai de médecine expérimentale chez des patients alcooliques afin de démontrer l’amélioration de la flexibilité cognitive, en réponse à une administration unique de psilocybine.

« Un tel essai bénéficierait d’une stratégie d’enrichissement basée sur le biomarqueur FDG-PET décrit ici », indique l’équipe.

Deuxièmement, ils suggèrent de réaliser une étude sur l’envie de fumer provoquée par des indices chez des patients alcooliques dans le cadre d’une IRM afin de démontrer une connectivité fonctionnelle normalisée dans les zones du cerveau connues pour être impliquées dans la réactivité neuronale aux indices, après une seule application de psilocybine.

« Dans le cas où les deux études expérimentales proposées sur l’homme donneraient des résultats positifs, un essai contrôlé randomisé (ECR) pour tester les propriétés anti-rechute de la psilocybine est indiqué », ont-ils conclu.

Bien que cette étude initiale soit prometteuse, les chercheurs reconnaissent qu’il est peu probable qu’il s’agisse d’une solution magique pour guérir de l’addiction à l’alcool, car de nombreux facteurs contribuant aux comportements de dépendance existent, et soulignent la nécessité de poursuivre les recherches.

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