Travailler dans un dispensaire de cannabis : à quoi ça ressemble ?
C’est devenu le nouveau rêve américain : aller au lycée, décrocher son diplôme, faire des études, vendre de la weed. Témoignage de Lindsey Bartlett, employée d’un dispensaire.
Pour être juste, j’ai majoré en Anglais, alors travailler dans un dispensaire à Denver me paraissait comme un bon deal.
Ma première expérience avec l’industrie du cannabis est arrivée quelques années plus tôt. En 2009, alors que le green rush commençait juste, je suis allé voir un docteur à Fort Collins (Colorado), je lui ai confié mes douleurs au dos et on m’a rapidement tendu une carte médicale temporaire. Entrer pour la première fois dans un magasin de cannabis était assez surréaliste : je voulais toucher tous les bocaux de weed, comme un enfant de 9 ans dans un magasin de bonbons. Réaliser que je pouvais choisir ce que je voulais fut un choc par rapport à ce que me proposait mon dealer sur un parking. Et le vendeur me paraissait avoir le job le plus cool du monde. Je suis allé le voir plusieurs fois avant de passer mes exams et de partir de Fort Collins pour retourner à Denver.
Un ami m’a décroché un taf avec un dispensaire médical à l’automne 2013. A l’époque, l’industrie du cannabis était beaucoup plus régulée. La plupart des leçons que l’Etat avait appris en autorisant la vente de marijuana médicale serait appliquée aux nouveaux magasins de cannabis récréatif qui étaient prêt à ouvrir. Je fus assignée au premier étage d’un magasin miteux de Denver. Je l’appelais la « cabane de la weed ».
Je régurgitais mécaniquement mon discours de vendeuse, que ce soit à un jeune stoner qui avait réussi à avoir une carte médicale ou à une libraire cinquantenaire, mère de 4 enfants. J’ai eu des patients qui avaient survécu à des cancers, certains qui avaient des scléroses en plaque, d’autres des maladies des intestins; tous étaient vraiment aidés par le cannabis. J’essayais de bien m’occuper de mes clients réguliers, et leur gardait certains lots de weed spécialement pour eux. Une des patientes me rappelait ma tante : elle préférait consommer son cannabis dans une barre de chocolat à la menthe, je lui en mettais donc de côté pour quand elle reviendrait.
La « cabane de la weed » était vraiment accessible pour tous les patients médicaux, mais je savais que parfois nous étions les dealers de dealers, qui revendaient une portion de ce qu’ils achetaient chez nous. 60% de nos patients achetaient leur limite quotidienne chez nous, équivalente à 56g par jour. Même un fumeur très habitué ne peut pas tout consommer.
Une batte en métal et un bouton d’alarme étaient mes seules formes de sécurité, malgré le fait que j’étais assis sur plusieurs centaines de grammes de weed et plusieurs milliers de dollars en cash, à n’importe quel moment. Comme beaucoup de dispensaires, nous avions notre solde happy hour hebdomadaire : le Wax Wednesday qui ramenait le prix des concentrés de 25 à 20$. La facture quotidienne d’un client pouvait passer de 1600 à 1200$, en cash, en une vente. J’étais le gardien des clés, mais pas le manager, j’avais donc la tâche délicate d’ouvrir et fermer le magasin pour 10$ de l’heure. Mais le bouton d’alarme prenait la poussière. Pas parce que je me sentais en sécurité, mais parce que le bouton restait dans un tiroir. Même si je gagnais plus et risquais moins de choses à vendre des t-shirts chez H&M, j’aimais mon travail.
Les choses ont rapidement changé, dont les prix qui ne cessaient d’augmenter pour les ventes récréatives.
J’ai commencé à vendre du cannabis récréatif en janvier 2014, au premier jour des ventes officielles. Les files d’attente étaient longues et ces jours, chaotiques. Je passais 13h d’affilée debout, à parler. Pour économiser ma voix, je rassemblais mes patients en groupes, leur expliquant les règles du Colorado et les bases du cannabis. Je n’avais pas le temps de manger ou de faire une pause. Tous les magasins n’avaient pas de boîte à pourboires, mais nous en avions une, en nous aimions la voir servir. J’essayais de fournir autant d’informations que je pouvais, mettant à profit mes années d’expérience. Certaines personnes ne savaient pas comment utiliser une pipe, donc je leur montrais, ou je les dirigeais vers des joints pré-roulés et leur indiquais comment les allumer. Je me rappelle être en train de penser « quelqu’un vient juste de mettre 100$ de pourboires pour lui avoir expliquer comment fumer de la weed ». J’étais la femme qui murmurait à l’oreille de la weed. J’aurais pu mettre un pochon de beuh près de mon oreille et déclarer « Qu’est-ce que c’est ? Ho, elle dit qu’elle est une 80% indica ».
Une personne m’a fait le plus beau compliment possible en m’appelant le « Yoda de la weed ». Beaucoup de choses vous avez à apprendre.
J’ai appris qu’il n’y avait pas un unique type de fumeur. Tout comme il y a de multiples patients médicaux traités par du cannabis, il existe beaucoup de fumeurs récréatifs, même si c’était surtout des touristes. Nous avions une carte qui montrait d’où venait nos clients. Certains fumeurs n’avaient pas fumé depuis des années. Leur imagination était remuée par la créativité qui existe autour des accessoires, des concentrés, de la space food ou des nouveaux moyens de fumer du cannabis. Et leur question numéro 1 : où pouvaient-ils fumer ?
Pour la plupart, les clients me traitaient avec respect, et j’appréciais travailler pour eux. Le proprio du dispensaire ? Pas tant que ça. Avec l’argent gagné, il s’est acheté une nouvelle voiture, des vêtements de luxe, des Rolex et même une table de réunion plaquée or. Ils ne partageaient pas leur nouvelle richesse avec leurs employés. Et même si les salaires avaient augmenté, ils étaient toujours faibles comparés au cash que ramenaient les ventes. Mais au moins, la plupart des magasins ont maintenant des agents de sécurités et offrent des avantages à leurs employés.
Je n’ai pas attendu du voir le business évoluer, tout au moins pas de l’intérieur. Mon taf était comme un petit ami abusif : il était chaud au début, mais ne me traitait finalement pas bien. Mais cela n’a pas changé le fait que j’aime l’industrie du cannabis, et j’aime les opportunités que cela offre au Colorado.
Via http://www.westword.com/news/the-weed-whisperer-my-life-as-a-pot-dispensary-employee-7108071
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