Cannabis en France

Colloque du 13 avril sur le cannabis médical et le CBD : le récap’

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C’est entre joie et déception que se réunissaient hier les acteurs du cannabis médical et du CBD pour un colloque organisé à l’Assemblée Nationale à l’initiative du député Ludovic Mendès. Joie parce que depuis le premier colloque il y a 4 ans, les deux sujets de ce colloque ont avancé. Déception car les blocages administratifs et politiques sont encore nombreux et lèsent toujours personnes malades et producteurs et consommateurs de chanvre.

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En introduction, Robin Reda, ancien président de la Mission d’informations sur les usages du cannabis, a reconnu qu’il restait encore beaucoup de chemin à parcourir sur le cannabis en général, qui parfois rassemble, parfois divise. Si les résistances sont encore très fortes, il considère qu’elles ne sont pas le fait du Parlement, unanimement en faveur d’une prise en charge de la douleur et de la souffrance des patients et de leurs familles. Les freins administratifs persistent toutefois sur le cannabis médical, avec peu d’éléments de compréhension de son côté.

Table-ronde sur le cannabis thérapeutique

Chez Nicolas Authier, c’était la soupe à la grimace. Le président du Comité scientifique temporaire pour le suivi de l’expérimentation du cannabis à usage médical, a eu beau chercher quelque chose de positif et de nouveau à annoncer sur l’expérimentation, il a fait chou blanc. Il a néanmoins tenu à rappeler que les rapports sur « l’expé » ont tous été positifs et que l’enjeu se situait désormais au-delà des conditions d’accès au cannabis thérapeutique ou de la mise en place d’une prescription hospitalière.

Il appelle de tous ses vœux à sortir de l’expérimentation dont les limites ont été atteintes pour les médecins généralistes, avec une procédure d’inclusion des patients lourde, et pour les hôpitaux qui ne peuvent répondre à la demande.

« Je ne vois pas ce qui pourrait empêcher de faire ça » a-t-il déclaré. « On a besoin d’un soutien extrêmement fort, des patients et des politiques » pour arriver à convaincre le ministère de la Santé de donner une impulsion très forte à son administration vers une généralisation du cannabis médical.

« Si nous n’avons pas de retour avant l’été, ça ne pourra pas être intégré dans le PLFSS 2024, et nous irons vers un arrêt de l’expérimentation » a-t-il résumé.

Mado Gilanton, présidente de l’association Apaiser S&C et qui se soigne elle-même avec du cannabis, était là pour apporter la parole des patients.

« Il y a 5 ans, nous sommes venus ici avec beaucoup d’espoirs. Aujourd’hui, je suis en colère ». L’absence d’intérêt et les blocages de la Direction Générale de la Santé tout comme sa gestion calamiteuse de l’approvisionnement de l’expérimentation en médicaments à base de cannabis ont douché son habituel entrain.

Franz Deschamps, président de Santé France Cannabis, le regroupement des industriels du cannabis médical, s’est lui penché sur ce qu’il restait à faire au niveau réglementaire pour permettre une production française de cannabis médical. 2 arrêtés qui complèteront le décret de 2022 sont ainsi en cours de rédaction et s’attacheront à la sécurisation des sites de culture et à la sécurité et la stabilité des futurs médicaments à base de cannabis.

Tables-rondes sur le CBD

Deux tables-rondes étaient organisées autour du CBD et du chanvre bien-être.

La première a fait intervenir, Ludovic Rachou, président de l’Union des industriels pour la valorisation des extraits de chanvre (UIVEC), qui était là pour défendre une vision isolée du CBD, à savoir la nécessité de classifier la molécule de cannabidiol comme complément alimentaire pour l’inclure dans les produits alimentaires. Au-delà d’une plus grande facilité de compréhension réglementaire, l’intérêt serait une fiscalité à 5,5% sur ce type de produits et la possibilité d’allégations de santé.

Le représentant de l’UIVEC a aussi annoncé avoir soutenu auprès de la DGCCRF et de la DGAL des limites en CBD de 50mg/jour et de 20% par flacon d’huile CBD, ainsi qu’un seuil de THC à 1 microgramme / kilo de poids corporels pour de futurs contrôles en boutique.

A contrario, l’Association européenne du chanvre industriel (EIHA), l’Union Des Professionnels Du CBD (UPCBD), l’Association Française des Producteurs de Cannabinoïdes (AFPC) et le Syndicat Professionnel du Chanvre (SPC) ont défendu sur une seconde table-ronde une vision full spectrum du chanvre pour, notamment, donner toutes ses chances à une future filière française de qualité.

Blagueur pour commencer – « C’est ma 4è intervention sur le sujet. J’aurai bientôt fait plus d’interventions que certains députés pendant leur mandat » – Jouany Chatoux, représentant de l’AFPC, a dressé le portrait des producteurs de chanvre à actifs français qui seraient aujourd’hui entre 600 et 1000. Pour la plupart, leur production de chanvre à actifs permet un complément de revenus non négligeable, avec 70% d’adhérents à l’association en production biologique. Leur récolte vise davantage la qualité et est vendue en circuit court.

Ce schéma serait par ailleurs idyllique si la menace du Novel Food ne planait au-dessus d’eux. Pour l’AFPC, le passage du CBD en complément alimentaire vise à tuer la filière biologique et la filière agricole du chanvre à actifs, quitte à favoriser l’import d’isolat de CBD des Etats-Unis ou des Pays de l’Est. La fabrication d’isolat de CBD nécessite en effet des solvants qui ne sont pas compatibles avec un produit final biologique. La France aura par ailleurs beaucoup de difficultés à être compétitive face aux prix très bas du CBD isolé à l’international.

La seule voie de compétitivité pour le chanvre à actif français réside alors dans des extractions naturelles et full spectrum, avec la nécessité d’augmenter les taux de THC dans les plantes pour des extractions rentables et de qualité. Une position partagée par l’EIHA qui travaille au niveau européen à un cadre sécurisé pour la plante entière de chanvre.

Si le Novel Food est une menace européenne, une autre menace bien française réside dans l’augmentation des dépistages de THC lors des contrôles routiers. Bien loin de rendre la route plus sûre, elle a pour objectif non-négligeable, selon Charles Morel, représentant de l’UPCBD, de cibler les consommateurs de CBD. 651 000 dépistages de stupéfiants sur la routé ont ainsi été effectués en 2021 contre 425 000 en 2019.

Logiquement, en 2021, les infractions pour conduite sous stupéfiants ont été supérieures à celles pour l’alcool, alors même que l’alcool représente le plus gros risque d’accidents. L’UPCBD a également rappelé qu’au-delà du caractère répressif de ces dépistages, aucune prévention des risques n’est faite derrière. Du chiffre pour du chiffre.

Conclusion

En conclusion du colloque, Ludovic Mendès a souhaité que ce soit le dernier colloque a être organisé sur le cannabis médical et le chanvre bien-être.

Les blocages qui existent à la MILDECA, à l’Intérieur ou à la Santé n’ont selon lui pas lieu d’être, alors que des réponses sont nécessaires pour sécuriser l’accès aux malades à du cannabis thérapeutique, quitte à dépénaliser pour les patients qui s’auto-traitent, et pour mieux encadrer la sécurité routière avec un seuil de THC acceptable ou des tests de dépistage / comportementaux appropriés au regard de la légalité de la consommation des fleurs CBD qui peuvent contenir jusqu’à 0,3% de THC.

Une proposition de loi devrait être présentée rapidement pour répondre à ces points.

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