L’ancienne maire de Saint-Ouen pour la légalisation du cannabis
Sur le site d’information « Regards« , l’ancienne maire de Saint-Ouen, Jacqueline Rouillon, prône un changement radical de la politique. Membre du parti « Front de gauche », elle raconte sa souffrance et l’incapacité des pouvoirs publics à stopper le trafic de cannabis. Dans cette interview, elle est accompagnée de la sociologue Anne Coppel, auteure du livre « Expérimenter des alternatives à la prohibition ».
Les premiers pas désorganisés
Lors de son arrivé à la tête de la ville en 1999, le trafic de stupéfiants était peu structuré, local et surtout isolé en petit point de vente. Elle cite un officier de police de Bobigny: » Aujourd’hui ça va, mais le jour où ils seront en réseau, ce sera la catastrophe ». On relevait à cette époque une absence de trafic pendant les vacances d’été. Même les dealers ont droit au repos.
Cependant, le réseau se crée au début des années 2000. Les points de ventes se multiplient et des rivalités territoriales apparaissent. L’organisation du trafic induit une hausse forcée de la violence : règlements de compte et violence gratuite font leur apparition dans la ville. Cette organisation, et la clientèle qui afflue, conduit les médias à qualifier Saint-Ouen de « supermarché » de la drogue. Les « employés » peuvent s’engager dans cette voie à longue durée ou même remplacer une personne pour deux semaines et se retirer aussi vite qu’ils y sont entrés.
Haine des flics, paix sociale et absence d’alternative
La traque du consommateur et des petits dealers fait du dégâts des deux côtés. La police perd son temps à courir derrière le bas de la pyramide du trafic. Le jeune dealer ou consommateur est relâché dans la foulée, souvent sans suite ou avec une infraction mineure. Cependant, cette arrestation fera forcément augmenter le sentiment « anti-policiers ». Face à la répression toujours plus intense, l’ancienne maire remarque que les trafiquants sont de mieux en mieux organisés. De plus, Jacqueline Rouillon souligne « l’hypocrisie » du système de répression. Meme en cas d’amélioration du système judiciaire et policier le trafic ne s’arrêtera jamais tant qu’il génère de l’argent.
L’ex maire de Saint-Ouen insiste sur la paix sociale et l’utilisation de l’argent du trafic. Selon elle, le problème le plus profond provient de la misère de ces milieux. Des familles entières, mères célibataires et jeunes sans revenus vivent de ces revenus illégaux. Si les sources d’argent se tarissent, ces personnes se tourneront vers d’autres trafic ou vers des vols plus traditionnels. Ainsi Mme Roussillon, déclare que les ex-dealers arrivé vers 22/ 23 ans savent qu’il faut s’insérer dans l’économie légale, que la vie sans feuille d’impôts et de revenus légaux est impossible.
Les dires d’une spécialiste
L’erreur fatale arrive en 2007 où le gouvernement décide d’accentuer « la guerre à la drogue » en commençant par les consommateurs. Le but est d’instaurer la peur et ainsi réduire les déplacement vers les points de deal. Une politique qu’on peu qualifier sans se mouiller d’échec cuisant. Mme Anne Coppel encourage une progressivité des reformes :
- Dépénalisation
- Légalisation des usages thérapeutiques
- Autoproduction en petite quantité
- Légalisation récréative.
Elle propose également comme autre alternative un meilleur ciblage de la criminalité. Elle se base pour cela sur l’exemple de Boston, une ville où la criminalité devenue endémique faisait fuir les habitants. La ville a choisi de cibler les criminels violents en laissant le trafic de cannabis s’écouler assez librement. La criminalité a depuis nettement baissé et l’état du Maschachussets votera le 8 novembre sur la légalisation du cannabis.
Aujourd’hui un livre écrit par deux journalistes du « Parisien » sur la ville de Saint-Ouen sort en librairie. « Une ville sous emprise » raconte l’histoire des consommateurs, guetteurs, trafiquants et habitants. Réalisé en immersion pendant 1 an, ce livre fait un point précis sur la situation actuelle de la ville.
Théo Caillart
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